Petite histoire de la séduction

Petite histoire de la séduction

Alors que les grandes civilisations de l’histoire comprenaient l’importance des alliances entre royaumes, les victimes désignées de ces futures alliances comprenaient quant à elles l’importance de la séduction.

Petite histoire de la séduction

S’il existait la moindre petite chance d’échapper à un mariage atroce, c’était bien en tentant de séduire un parti moins désolant. Encore fallait-il qu’il y ait justement plus d’un(e) candidat(e), mais de choisir entre deux maux valait encore mieux que de subir la fatalité. On séduisait alors avec des parures, des cadeaux, des poèmes et un comportement fidèle à certains codes sociaux (l’amour courtois, par exemple) inhérents à chaque royaume. Hors des sphères de pouvoir, la séduction existait aussi, chez les paysans, les manants, les gueux. Mais l’on assistait sans doute à des effusions spontanées, la loi de l’attraction en quelque sorte, qui devaient trop souvent mener au coït clandestin et se conclure parfois trop rapidement à un mariage de convenance pour légitimer les fruits de ces emportements.

Il faut attendre des personnages romanesques et frondeurs tels que Casanova, le vicomte de Valmont ou la marquise de Merteuil pour élever au niveau de l’art la séduction. Charme, manipulation, stratégies, minauderies, grivoiseries, coquineries, tout est là pour concocter des approches, des conquêtes, et hélas, des mises à mort amoureuses. Roger de Bussy-Rabutin dans son redoutable pamphlet L’histoire amoureuse des Gaules (1665) dévoile sans scrupules les jeux de séduction de la cour de France alors que le jeune Louis XIV en est encore à ses premiers flirts. On sait que le roi deviendra par la suite un grand séducteur tout comme l’avait été avant lui Henri IV que l’on surnommait le vert-Galant. Mais là, on joue désormais dans la cour des grands. Grâce à l’art de l’éloquence ainsi qu’à un code comportemental très élaboré, la séduction atteint un niveau de perfection exquis en France. Ninon de Lenclos sera sans doute la plus délicieuse séductrice de ce 17e siècle qui fera de la séduction à la française un sport national, toutes classes sociales confondues.

Après des décennies de séduction dans les règles de l’art, le 20e siècle amène ses petites révolutions, dont la révolution sexuelle, fin des années 1960, et le courant hippie qui désormais désacralise la séduction. Rien ne sera plus pareil, les codes vont voler en éclats au profit d’approches directes et sans formalité à travers lesquelles les individus vont se fondre et se mêler sans se soucier des sexes et des liens d’appartenance de chacun. C’est la partouze hippie planétaire, le Peace & Love qui répète en boucle : faites l’amour, pas la guerre !

Depuis, l’arrivée d’Internet modifie une fois de plus les codes de séduction à travers le monde.

Le Net ouvre désormais une fenêtre sur le flirt mondial. Et en referme un autre sur les dragues directes. Aujourd’hui, quoi de plus chill que de draguer sur des sites de rencontres ? Quoi de plus sécuritaire que de badiner sur un tchat en ligne ? Inutile de risquer la rencontre qui met mal à l’aise avec un vis-à-vis totalement à l’opposé de son fantasme quand on peut cerner l’individu en restant anonyme derrière l’écran de son ordinateur. De plus, c’est comme une sorte de retour en arrière, un échange de mots avant tout, un remplacement abrégé de ces échanges épistolaires qui charmaient nos ancêtres tout en leur permettant de créer des liens extrêmement forts.

Petite histoire de la séduction